
Yucca dis-moi pourquoi ?




L'ingratitude
J’ai acheté une plante chez Botanic. J’aime bien les plantes. Ça donne de la chaleur et de la vie à une pièce. En plus il parait que ça capte le carbonne. On respire mieux avec une plante chez soi. C’est un peu comme gravir l’Everest avec un masque à oxygène… sauf que c’est pas pareil.
Oui, j’ai acheté une plante chez Botanic. Mais elle me fait la gueule. Je ne comprends pas pourquoi ces plantes si gracieuses en magasin se retrouvent à me tirer la langue dès que je les installe chez moi. C’est la déco qui ne leur plait pas, ou la musique peut-être.
Enfin mon yucca qui semblait vouloir étirer ses feuilles à s’en faire éclater la chlorophylle ressemble maintenant à un hippi décrépi avec les cheveux devant les yeux. Comme si un mauvais coiffeur lui avait raté sa permanente et sa couleur. Plus aucune feuille qui ne soit jaunie et larmoyante.
Pourtant j’en prends soin de mon yucca, je le bichonne. Un peu d’eau par-ci, de l’engrais par-là, et que je te vaporise les feuilles et que je t’essuie la poussière.
C’est ingrat une plante.
J’ai potassé tous les bouquins, visité tous les sites internet pour savoir ce qu’il convenait de faire pour sauver mon Yucca. Je ne pouvais le laisser mourir de chagrin sans réagir. Surtout un chagrin dont je n’arrivais pas à cerner la provenance.
J’appris ainsi, en faisant de longues recherches, que le yucca est originaire du Mexique. Mais mon dieu, mais c’est bien sûr ! Il fallait que j’arrive à recréer son habitat naturel à mon yucca ! J’achetais donc un CD de café Tacuba, un groupe mexicain. Une musique à faire chialer un catcheur mais pour la convalescence de mon yucca, rien n’était trop beau. Ce soir là je ne pus fermer l’œil. Trop nulle la musique.
Je fis brûler mes lasagnes, exprès, pour faire de la fumée. J’avais lu que Mexico était une des villes les plus polluée au monde. Ce soir là, je ne mangeais rien. Trop cuites les lasagnes.
J’avais appris aussi que les nuits pouvaient être très froides là-bas, dans son pays à mon yucca. Je laissai donc la fenêtre ouverte et la température chuta à 10 °C. Ce soir là, je tombai malade. Trop léger mon pyjama.
Mais rien n’y fit. Mon yucca dépérissait à vu d’œil.
Affolé, je retournai voir le forum sur internet. « Le rempoter » me répondit énergiquement un internaute.
C’est pas du terrorisme ça ! On vous vend une plante dans un pot en plastique tout petit, comme si on vous vendait des pompes en 35 alors que vous faites du 42 ! Et si vous ne faites rien, votre plante est vouée à une mort certaine car ses racines ne peuvent s’épanouir.
Quel scandale ! Et personne il vous le dit. Il y a non assistance à plante en danger !
Je remerciais abondamment l’internaute qui m’avait ouvert les yeux sur cette cruelle réalité.
Et me voilà parti pour acheter un pot chez Botanic.
Un vendeur me voyant hésiter vint s’enquérir de ma circonspection.
- Avec ou sans réserve d’eau ? Avec trou ou sans trou ? me demanda–t-il mécaniquement.
J’avoue que je n’avais pas réfléchi à tout ça. Je n’y connaissais rien. Je lui répondis par une autre question :
- Vous n’avez pas internet ? faut que je regarde ce que dit le forum.
- C’est pour quelle plante ? dit-il en souriant mièvrement.
- C’est pour un yucca.
- Un yucca aloifolia ou un yucca elephantipe ? continua t-il.
- Mais qu’est ce que j’en sais moi ! Un yucca normal avec un tronc et des feuilles.
Il commençait un peu à m’énerver avec toutes ses questions.
- Oui mais si vous ne me dites pas l’espèce, je ne peux pas vous orienter vers tel ou tel contenant.
- Bon, je vais prendre celui-ci, dis-je pour couper court à la conversation.
- Ça c’est un cache pot, pas un pot, ricana mon vendeur.
- Et les pots ils sont où ? fis-je autoritairement.
- Ça dépend vous voulez quoi comme pot ?
- Un pot pour mettre de la terre dedans ! criais-je.
Là il me gonflait vraiment avec son air con et ses questions moisies. J’en venais à soupçonner qu’il fut de la famille à la mère Borret, lisant dans son œil quelque jouissance à faire chier le quidam. Et je n’aimais pas sa manière de me prendre de haut. Après tout, il n’y a pas de quoi frimer lorsqu’on vend des pots en plastiques ! Surtout avec des trous en plus. Ça frise l’arnaque.
Je suis en urgence moi, en mission humanitaire ! J’ai une plante à sauver. Je n’ai pas le temps de jouer à la dînette ni à question pour un champion.
Je suis reparti avec un pot sans trou. Je ne voulais pas payer plus cher un pot troué : question de principe. Le vendeur me courut après pour me dire que j’avais vu beaucoup trop grand. Je ne me souviens plus exactement ce que j’ai marmonné comme réponse.
Peut-être lui ai-je dit d’aller se faire voir, mais je ne l’ai pas dit fort.
En voulant dépoter mon yucca, j’ai arraché la moitié des feuilles et renversé toute la terre. Bien fait. Il n’avait qu’à y mettre de la bonne volonté aussi ce yucca. Lorsque j’ai voulu le rempoter, je n’avais pas assez de terre. Le pot était trop gros...
Il s’est retrouvé tout penché dans son contenant mon yucca. Il ressemblait à la tour de pise. Avouez que c’est amusant pour un arbre mexicain.
J’ai acheté une plante chez Botanic.
Elles sont nulles les plantes là-bas, la prochaine fois j’irai chez Jardiland.
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